La première édition du salon Viva Technology s’est tenue du 30 juin au 2 juillet à Paris, l’occasion pour nous de rencontrer Philippe Rase, Sales Strategy & Planning lead EMEA pour les grands comptes du secteur télécom chez Hewlett-Packard Enterprise. Philippe est également membre fondateur de la French Tech à Grenoble et Vice-Président de Grenoble Angels depuis 10 ans. Dans ce cadre, il accompagne des start-up françaises qu’il suit depuis une dizaine d’années. Interviewé par Milkshake Valley, il revient sur le dynamisme actuel du secteur.

Quelles sont les grandes tendances en matière d’innovation d’après toi?

Philippe Rase : 5 000 start-up étaient présentes à ce premier événement parisien dédié à l’innovation, organisé par Publicis et Les Echos. Les sujets de la robotique, la réalité virtuelle ou encore big data étaient à l’honneur mais en fait toutes les tendances qui agitent la planète Tech de Paris à la Silicon Valley étaient représentées. French Tech oblige, une grande partie de ces « jeunes pousses » sont venues défendre les couleurs du pays. De grands leaders politiques ou de sociétés internationales ont redécouvert l’étendue de l’innovation déployée dans de nombreux secteurs en France grâce à la nouvelle image portée par la French Tech. Certains ont d’ailleurs souligné lors de Viva Technology que la France est déjà la Silicon Valley de l’Europe, et une vraie start-up nation ! La France, avec la French Tech, a pris le leadership de la grande transition actuelle : la digitalisation.

Quelle est la dynamique des start-up en France à l’heure actuelle ?

PR : Dans les faits, depuis le début de cette année 2016, la France est devenue le pays ou le plus de start-up se créent en Europe, devant le Royaume-Uni. Beaucoup de ces start-up sont créés par des jeunes qui veulent devenir entrepreneurs à la sortie des études mais pas uniquement. Toutes les grandes écoles de commerce ont développé des filières liées à l’innovation et/ou l’entrepreneuriat ces dernières années. Un grand nombre d’étudiants français ou étrangers y viennent dans l’espoir de se « lancer » que ce soit en France ou à l’étranger. Viva Technology est le reflet de cette dynamique actuelle qui semble être plus une tendance de fond qu’un effet de mode.
L’effet de « mode » de l’entrepreneuriat est, à mon sens, passé. Les créateurs, de nos jours, sont bien conscients des obstacles embuches et challenges qu’ils vont devoir affronter dans l’aventure.

Cette dynamique est-elle une spécificité française ou est-ce la même chose ailleurs en Europe ?

PR : Je pense que c’est l’ampleur et l’accélération du phénomène de nos jours qui est spécifique en France. Au début du XXIème siècle, au moment de la « bulle internet”, les jeunes étaient bien moins nombreux en proportion à vouloir créer leur entreprise dans ce pays. Le phénomène est aujourd’hui plus ancré dans un véritable changement d’état d’esprit. D’abord, il existe depuis plusieurs décennies une méfiance grandissante envers l’administration publique qui pousse les jeunes à se tourner vers l’entreprise privée. Ensuite, il y a une volonté et un besoin de donner davantage de sens à ce que l’on fait au travail. Un besoin d’être en lien direct avec l’impact et le résultat de nos décisions et actions ce qui amène de plus en plus de jeunes ou cadres d’entreprises ou voire même de la fonction publique à se tourner vers la création, la reprise d’entreprise ou l’innovation de manière plus large même si cela comporte plus de risque.

L’innovation est un pari qualifié de la clef de la prospérité économique. L’innovation est gage de succès futur. L’innovation est partout, dans tous les domaines d’application. Les secteurs de la santé, de l’énergie, de la préservation et utilisation des ressources terrestres sont en transformation profondes entraînés par les innovations marquantes des secteurs de l’informatique et télécommunication. La digitalisation est source de valeur et d’accélération pour chacun des processus de ces entreprises.

Quels sont ces challenges et risques dont tu parles ?

PR : Les risques sont ceux des entreprises de tous les temps : manquer un virage technologique, mal s’entourer, miser sur une innovation dont l’application ne sera pas d’usage recherché. Pour un grand groupe, le risque pourra être de ne pas avoir la célérité et l’effort focalisation suffisants pour apporter cette innovation à l’usage. Pour une start-up les risques peuvent être également l’essoufflement financier: ne pas avoir le temps et les ressources financières ou humaines nécessaires à apporter pour développer cette innovation. Les challenges sont ceux liés à la capacité de l’entreprise à trouver l’équilibre entre transformation et disruption. Il s’agit de besoin d’équilibre humain, financier de résultat d’aujourd’hui et d’investissement pour le résultat de demain. Ces risques et challenges sont à mon sens aujourd’hui amplifiés par le rapport au temps de l’innovation dont l’accélération est constante. Il s’agit donc souvent d’une course aux ressources en commençant par le financement même de l’innovation.

Comment ces start-up se financent-elles alors que les investisseurs européens sont connus pour être plus frileux ?

PR : Il est vrai que pendant longtemps, il y a eu moins d’argent en Europe qu’aux États-Unis, alloué à l’innovation et aux start-up. Ceci est en train de changer car les mécanismes d’accompagnement de l’innovation et de l’entrepreneuriat se sont renforcés et sont désormais soutenus au sein de l’Europe et de ses pays membres à tous les niveaux. Que ce soit administratif/secteur public, secteur privé et soutien aux personnes (entrepreneur ou investisseurs), tous les dispositifs se sont maintenant développés et professionnalisés pour permettre de développer un écosystème vertueux encourageant la prise de risque entrepreneuriale. Les investisseurs privés et institutionnels sont revenus sur le marché des start-up aux stades d’incubation, d’ultra amorçage et d’amorçage et, phénomène plutôt nouveau, les grands groupes industriels se montrent désireux de soutenir les écosystèmes dans ce secteur. Ils sont nombreux en France à lancer des initiatives qui vont du parrainage, de l’incubation, l’accélération à la prise de participation. Le programme Start-Up Hewlett-Packard Enterprise en est un très bon exemple.

Philippe Rase

Philippe Rase

Sales Strategy & Planning lead EMEA pour les grands comptes du secteur télécom chez Hewlett-Packard Enterprise.

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