La startup Datafarm Energy utilise le biogaz créé par le fumier et les déchets verts des exploitations agricoles pour alimenter les datacenters en électricité et en froid… En installant ces datacenters directement dans des fermes.
Fournir de l’énergie aux datacenters grâce à la fermentation des biodéchets. Cette idée originale, c’est celle du projet Datafarm Energy, qui propose d’installer directement les datacenters dans des fermes productrices de biogaz, issu de la fermentation des déjections animales, de la récolte végétale et des déchets alimentaires. L’entreprise française créée par Stéphane Petitbon transforme alors cette énergie primaire en électricité et en froid, pour alimenter les datacenters directement sur place. Une innovation bénéfique pour les datacenters, pour les agriculteurs et pour l’environnement.
« Utiliser le biogaz, qui est une énergie renouvelable, nous permet de baisser les émissions des consommations énergétiques, affirme Romain Gabriel, directeur commercial de Datafarm Energy. Grace à notre procédé intégré dans la DatafarmBox, nous allons également valoriser les chaleurs fatales des serveurs des datacenters et les renvoyer vers les agriculteurs ».
Les trois piliers de Datafarm avec à gauche, le CEO Stéphane Petitbon, la co-fondatrice et directrice de la communication Gabrielle Dufour au centre et à droite, le responsable commercial Romain Gabriel.
Du fumier jusqu’aux datacenters
Cette DatafarmBox, c’est le maillon essentiel du schéma circulaire imaginé par l’entreprise. Avant tout, la startup prend contact avec des fermes qui produisent du biogaz à partir de déchets agricoles. Ces déchets verts fermentent dans une cuve, pour créer du méthane (CH4) : C’est le processus de méthanisation.
« Ça, c’est le travail des agriculteurs, précise Romain Gabriel. Nous, nous venons nous interfacer avec eux grâce à la Datafarmbox. Cette innovation se base sur le procédé de la trigénération, qui permet à partir du biogaz, de co-générer de l’électricité et de la chaleur. Cette chaleur est renvoyée dans un échangeur thermique, qui va la transformer en froid, avec des rendements élevés, entre 70% et 75%. Un froid nécessaire pour les datacenters, conjointement à l’électricité produite ».
Une aubaine pour les agriculteurs
En plus de fournir l’énergie électrique et thermique, Datafarm Energy récupère les chaleurs émises par les Datacenters installés dans la ferme, au bénéfice de l’agriculteur. Ce dernier peut alors les utiliser par exemple pour sécher les foins nécessaires à son élevage ou bien pour chauffer ses installations.
L’ entrepreneur agricole tirent également de ce procédé un avantage économique. Il obtient d’abord des revenus complémentaires par la location du foncier. Ensuite Datafarm Energy rachète le biogaz qu’il produit et l’agriculteur pourra également valoriser la séquestration carbone à travers diverses pratiques agricoles et de gestion des terres. « Enfin, il ne faut pas négliger l’image de marque puisque ces agriculteurs deviennent alors des pionniers, qui en plus de leur activité agricole, vont accompagner la digitalisation de leur région » note le responsable commercial.
La solution Datafarme s’apprête à être déployée dans cette exploitation agricole : Le hangar de gauche héberge le processus de méthanisation tandis que dans la ferme de droite seront placés les datacenters.
Biogaz et datacenters, le couplé gagnant
La mise en relation du biogaz et des datacenters peut paraître audacieux. Mais selon, Datafarm Energy, ces éléments étaient faits pour travailler ensemble.
« Nous ciblons les datacenters parce que c’est une industrie que l’on peut, selon la connectivité à la fibre, amener à la campagne. Ils ont besoin d’électricité et de thermique avec un profil de consommation relativement stable à travers l’année, décrit Romain Gabriel. Or, le biogaz est une énergie renouvelable non intermittente et pilotable, à la différence de l’éolien ou du photo-voltaïque. Cela permet d’avoir une production au regard de la consommation, et donc de s’émanciper du réseau électrique. Ce dernier est alors utilisé comme backup de l’installation ». Datafarm Energy n’exclut pas de fournir de l’énergie à d’autres acteurs industriels, pour élargir son portefeuille de clients dans le futur. Mais pour l’instant, l’entreprise semble avoir trouvé, entre le biogaz et les datacenters, la combinaison gagnante.
A l’heure du déploiement
Le projet Datafarm Energy murit dans l’esprit de Stéphane Petitbon depuis près de trois ans. Fin connaisseur de l’industrie digitale et des enjeux environnementaux relatifs aux datacenters, le CEO de Datafarm a identifié la méthanisation comme une solution aux besoins énergétiques des datacenters.
Depuis 2019, il mature l’innovation technologique, en collaboration avec l’Institut Mines Télécom, met en place le business-model et s’apprête aujourd’hui à signer ses deux premiers clients. « Nous avons réalisé une preuve de concept en 2020 avec un agriculteur en Bretagne. Depuis, nous avons débuté la commercialisation et nous engagerons bientôt la phase de construction et de mise en service des installations. Un dans le Grand Est et un en Normandie ».
A l’heure du déploiement et de trouver de nouveaux clients, le partenariat avec HPE devrait se révéler d’autant plus pertinent. « Dans un Datacenter, les deux principales sources de consommation, sont la production de froid, que l’on traite chez Datafarm en valorisant le biogaz puis la consommation des serveurs sur lesquels nous n’avons pas la main. En revanche, HPE produit ces équipements et les commercialise, note Romain Gabriel. On pourrait donc avoir une approche de co-selling avec HPE, de manière à aller voir nos clients pour leur proposer notre solution basée sur une source d’énergie renouvelable, mais aussi pour proposer un partenaire capable de les équiper avec des serveurs moins énergivores » .
Une association vertueuse qui sert les intérêts de Datafarm Energy dans sa volonté de s’inscrire comme un acteur de l’énergie renouvelable. Avec un modèle local et vert, la startup montre l’exemple sur l’un des enjeux majeurs de la transition énergétique.